Charleville-Mézières: le meurtrier de Nicolas Denis a-t-il agi en état de légitime défense ?

Catégorie :

Téléchargez notre article au format pdf

LOGO UNLien vers article de l'Union

 

L’avocat de la défense entend plaider la légitime défense pour son client accusé de meurtre et de tentative de meurtre en 2020 à Charleville-Mézières. Frédéric Potdevin, un Ardennais de 39 ans, est jugé devant la cour criminelle à partir de ce mercredi 18 octobre.

Quinze ans ! C’est la peine maximale encourue par Frédéric Potdevin si la cour criminelle des Ardennes le reconnaît coupable de meurtre sur Nicolas Denis et de tentative de meurtre sur Francis Jacquet. Et dans ce dossier vieux de plus de trois ans, Me De La Roche, l’avocat de l’accusé entend brandir l’argument de la légitime défense. « Je vais clairement mettre la question au débat ! Qu’est-ce mon client aurait du faire ce jour-là ? Deux hommes, à la stature imposante, alcoolisés et en pleine nuit, frappent à sa porte visiblement pour en découdre. »

Nicolas Denis a succombé cinq heures après avoir reçu le coup de couteau
Dans la nuit du 7 au 8 mai 2020, Frédéric Potdevin se trouve seul à son domicile, rue Harar, dans le quartier de La Houillère à Charleville-Mézières. Nicolas Denis, 36 ans, et un ami avec qui il passe la soirée, Francis Jacquet, 56 ans, se présentent chez lui. À 1 heure du matin, l’alerte est donnée notamment pas Frédéric Potdevin ; les policiers découvrent les deux amis grièvement blessés. Évacué vers le centre hospitalier de Charleville-Mézières avec une blessure à l’abdomen visiblement provoquée par une arme blanche, Nicolas Denis décède quelques heures plus tard.

De son côté, Francis Jacquet, l’autre victime, présente des plaies importantes aux avant-bras. Il est rapidement transféré vers le centre hospitalier de Namur, en Belgique, où il subira plusieurs opérations. « Mon client garde des séquelles irréversibles, insiste Me Harir, son avocat. Il n’est plus en mesure de travailler et surtout il est traumatisé par la mort de son ami, sous ses yeux. » Pour le pénaliste de Charleville-Mézières, la légitime défense ne tient pas ! « La riposte doit être proportionnelle à l’attaque. Mon client n’était pas armé alors que l’auteur présumé des faits était porteur d’un long couteau de cuisine dont il a fait usage. »

Un malheur pour tout le monde
Arthur De La Roche entend préciser que Frédéric Potdevin présentait de nombreuses traces de coups sur le corps, lui occasionnant plusieurs jours d’interruption de travail. « Mon client attend lui aussi de comprendre, notamment de la part de Monsieur Jacquet, ce qui s’est passé ce soir-là. Et croyez-moi, il vit très mal la mort d’un homme. C’est un malheur pour tout le monde. »

Le procès devant la cour criminelle des Ardennes doit se tenir jusqu’à vendredi où un verdict sera rendu. L’accusé, sorti de détention provisoire après huit mois derrière les barreaux, encourt la peine de quinze ans de réclusion criminelle.

Les faits
Dans la nuit du 7 au 8 mai 2020, une rixe éclate dans le quartier de la Houillère à Charleville-Mézières.

À l’arrivée des policiers vers 1 heure du matin, deux hommes gisent sur le trottoir, grièvement blessés à l’arme blanche.

Nicolas Denis, un père de famille de 36 ans décède à l’hôpital.

Son ami Francis Jacquet, 56 ans, garde des séquelles aux bras.

Un troisième homme, Frédéric Potdevin, 36 ans, est placé en garde à vue; il reconnaît avoir porté les coups de couteau.

À partir de ce mercredi 18 octobre, il est jugé devant la cour criminelle des Ardennes, pour meurtre et tentative de meurtre.

«Le meurtrier de mon fils doit être puni»
Un fils poignardé à mort. Son meurtrier présumé remis en liberté. Et un procès pour meurtre qui débute ce mercredi devant la cour criminelle des Ardennes. Depuis trois ans, Marie-Claude Mathy vit un enfer. « Heureusement, je suis entourée de ma famille et chaque jour, je vais voir mon gamin au cimetière », confie la septuagénaire à la veille du procès de l’homme accusé d’avoir tué Nicolas, le plus jeune de ses enfants. Une échéance que Marie-Claude Mathy, qui vit aussi à Charleville-Mézières, redoute. Aucun détail ne va lui être épargné, elle en a conscience. « Je me dois d’être là et d’assister à la totalité du procès. Nicolas, lui, est mort. Je peux survivre à un compte rendu d’autopsie et faire face au meurtrier. » En revanche, celle qui est partie civile dans ce dossier n’a qu’une crainte : « Que le meurtrier de Nicolas ne soit pas puni. Ça fait plus de trois ans que j’attends qu’il soit jugé et condamné. » La peine ? « Je veux juste qu’il retourne en prison. Il n’est resté en détention que huit mois, aujourd’hui il profite de sa liberté et de sa famille. » Et même si elle exècre ce terme, Marie-Claude Mathy confie : « Après le jugement, je vais peut-être pouvoir commencer à faire mon deuil et mon gamin, reposer en paix. » Ce mercredi matin, la mère de famille franchira les portes de la salle d’audience la photo de Nicolas plaquée contre son cœur.

ARTHUR DE LA ROCHE / Avocat : EN SAVOIR +