AGENT IMMOBILIER: ATTENTION DANGER

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En période économique délicate, certains peuvent être tentés de tirer quelques économies sur le professionnel de l’immobilier en exploitant la moindre faille.

Afin d’éviter ces désagréments, voici quelques rappels de prudence et pièges à éviter…


1° N’EST PAS AGENT IMMOBILIER QUI VEUT ?

Certaines professions échappent au statut de la loi HOGUET.

Le marchand de biens est un professionnel qui achète lui-même des biens immobiliers pour les revendre, si bien qu’il agit pour son compte personnel et non pour le compte d’autrui et ne relève, en conséquence, pas de la loi HOGUET.

Il en est de même pour le promoteur qui agit en qualité de vendeur pour son propre compte et sur son propre patrimoine.

En revanche, le vendeur de listes, c’est-à-dire les personnes physiques ou morales qui diffusent auprès du public des listes d’offres de propriétaires pour ventes ou pour locations entre dans le champ d’application de la loi.

Attention, toute personne qui se livre de manière habituelle, même à titre accessoire, à des opérations d’entremise sur les biens d’autrui sans respecter les dispositions de la loi HOGUET (carte professionnelle etc.) encourt une peine d’emprisonnement de 6 mois, outre 7.500 € d’amende

 

2° PEUT-ON EXERCER LA PROFESSION SANS DIPLOME ; QUE SE PASSE-T-IL EN CAS DE CONDAMNATION PENALE ?

L’exercice de la profession d’agent immobilier est réservé au titulaire d’un diplôme d’aptitude professionnelle, sauf si la personne justifie d’une expérience professionnelle pendant 10 ans dans une activité entrant dans le champ d’application de la loi HOGUET.

Quant aux condamnations pénales, seules les condamnations définitives pour crime ou d’au moins 3 mois d’emprisonnement sans sursis pour l’une des infractions visées dans la loi HOGUET interdisent l’exercice de la profession d’agent immobilier.

La seule condamnation pour excès de vitesse, par exemple, n’a donc aucune incidence.


3° PEUT-ON EXERCER SANS GARANTIE FINANCIERE ?

Le principe général issu de la loi HOGUET était évidemment d’assurer une garantie financière à l’agent immobilier.

Cependant, la loi du 23 juillet 2010 va introduire une exception lorsque l’agent ne détient aucun fonds, effet ou valeur.

Cette exception constitue un véritable piège pour le vendeur et l’agent immobilier.

Chacun sait que l’acquéreur qui a signé un compromis, mais n’a pas versé le moindre euro, ne se sentira pas réellement engagé.

De plus, si l’agent immobilier qui ne manie pas de fonds détient un chèque de l’acquéreur au nom d’un tiers, il n’y aura pas la moindre garantie pour le client en cas d’émission d’un chèque sans provision.

Il est donc de l’intérêt de tous de veiller à la souscription d’une garantie financière solide… comme le propose la SOCAF, d’autant que les tiers sont informés de l’existence de cette garantie, ce qui constitue un moyen publicitaire.


4° L’ASSURANCE DE RESPONSABILITE CIVILE EST-ELLE VRAIMENT OBLIGATOIRE ?

Des agents immobiliers doivent être en mesure de justifier de l’existence d’un contrat d’assurance couvrant pour chaque établissement, succursale, agent ou bureau les conséquences pécuniaires de la responsabilité professionnelle qu’ils peuvent encourir en raison de leurs activités.

Il est donc indispensable de veiller au contenu du contrat d’assurance, car il n’est pas rare qu’une cotisation annuelle attractive cache de faibles garanties truffées d’exonération.


5° UN COMPROMIS SIGNE EN VERTU D’UN MANDAT NON-INSCRIT SUR LE REGISTRE EST-IL NUL ?

Tout mandat doit être mentionné par ordre chronologique sur un registre coté sans discontinuité et relié, le cas échéant sous forme électronique sous peine de nullité du mandat et de tous les actes subséquents, cette nullité étant d’ordre public et, au demeurant, pénalement sanctionnée.

Le mandat doit également être écrit et préalable et la théorie jurisprudentielle du « mandat apparent » est inapplicable au regard de la loi HOGUET.

Il s’agit d’un préalable obligatoire au versement ultérieur de la commission.


6° PEUT-ON SIGNER UN MANDAT A DUREE INDETERMINEE ?

La durée du mandat doit obligatoirement être indiquée à peine de nullité.

Le mandat avec clause d’exclusivité doit rappeler qu’il ne peut être dénoncé au cours des trois premiers mois.

7° PEUT-ON RAJOUTER DES HONORAIRES DE REDACTION D’ACTE OU DE SEQUESTRE APRES LA SIGNATURE D’UN COMPROMIS ?

Seules les mentions figurant dans l’engagement des parties (promesse de vente, compromis etc.) sont applicables.

Il est donc indispensable de faire figurer dans l’engagement des parties le montant de la rémunération avec la partie qui en a la charge, les honoraires de rédaction d’acte et de séquestre, voire les conditions et modalités de partage de la rémunération entre les parties.


8° Le bon de visite est-il nécessaire et suffisant pour percevoir une commission ?

Contrairement aux idées reçues, le bon de visite ne vaut pas mandat régulier et n’autorise pas l’agent immobilier à percevoir une commission.

Faire signer un bon de visite à un acquéreur qui s’engage à ne pas signer l’acte de vente hors la présence de l’agent immobilier sous peine de sanction pécuniaire, n’a pas la moindre valeur !

L’agent immobilier n’a donc qu’une possibilité, à savoir se retourner contre le vendeur qui aurait conclu l’acte de vente dans le dos de l’agence.

Cependant, cette mise en œuvre de la responsabilité du vendeur n’est possible qu’à la condition que l’agent immobilier soit en mesure de prouver qu’il a informé le vendeur de l’existence de la visite avec l’acquéreur.

Trop d’agents immobiliers refusent de donner les coordonnées de l’acquéreur au vendeur à l’issue d’une visite craignant un arrangement entre les deux parties hors la présence de l’agent immobilier.

Il est cependant nécessaire de prévenir le vendeur et d’être en mesure d’en justifier dès la fin de la visite.

Le risque existe cependant si la visite a été effectuée par une personne et que l’acte est signé par son compagnon ou sa compagne qui a un autre nom.

Le vendeur pourra faire légitimement croire à l’agent qu’il ignorait le lien entre les deux parties…


9° FAUT-IL METTRE A LA CHARGE DU VENDEUR OU DE L’ACQUEREUR LA REMUNERATION DE L’AGENT IMMOBILIER ?

Le mandat de vente étant signé entre l’agent et le vendeur, il est indispensable, mais non obligatoire, de mettre à la charge du vendeur la rémunération de l’agent immobilier afin que cette obligation ait une valeur contractuelle.

A défaut, le mandat de vente serait inopposable à l’acquéreur qui pourrait contester le pourcentage réclamé par l’agent.


10° L’agent immobilier évincé par une autre agence ou par le vendeur et l’acquéreur concluant en direct, peut-il avoir droit a une commission ?

La réponse est négative depuis de nombreuses années.

En revanche, l’agent évincé peut parfaitement réclamer des dommages et intérêts équivalents au montant de la commission, sous réserve qu’il justifie d’un préjudice et donc de démarches qu’il a effectuées pour tenter de vendre le bien avec plusieurs acquéreurs successifs.

Il est donc important d’assurer une traçabilité de l’intervention de l’agent ou de ses salariés.


11° POURQUOI L’AGENT IMMOBILIER VOIT DE PLUS EN PLUS SOUVENT SA RESPONSABILITE ENGAGEE EN CAS DE LITIGE ?

Si une vente ne se fait pas, l’esprit gaulois nous pousse à trouver un responsable et si possible, bien argenté, c’est-à-dire bien assuré…

L’agent peut voir sa responsabilité engagée pour des vices de forme classiques : par exemple, l’agent met en vente un bien immobilier avec la signature d’un vendeur sans savoir que la personne qui a signé n’est qu’un co-indivisaire ; il est donc indispensable, au moment de la signature du mandat de vente, d’avoir une copie de l’acte de vente et de vérifier qu’il n’y ait pas eu de changement postérieur.

Mais c’est surtout sur le terrain du devoir de conseil qu’il est tentant de rechercher la responsabilité de l’agent immobilier et qu’il doit tout voir, tout savoir, tout deviner y compris l’information que le vendeur ignore ou lui cache…

Il convient donc d’être vigilant et d’inscrire des réserves dès qu’il y a un doute :

la charpente inaccessible a-t-elle été visitée (termites ?) ?
la chaudière et l’installation d’eau ont-elles été testées dans une maison fermée depuis plusieurs mois ?
à la campagne, les réseaux sont-ils faits : viabilité assurée ou viabilisable ?
le petit coup de peinture du vendeur cache-t-il des traces d’humidité ?
sommes-nous dans une zone aérienne ?
y-a-t-il un projet de construction générant des nuisances sonores (autoroute, centre commercial etc.) ?


En conclusion :

L’agent immobilier doit faire preuve d’une certaine prudence.

Certes, aux termes du mandat de vente, il est le mandataire du vendeur, mais il ne peut vendre à tout prix et à n’importe quelles conditions le bien immobilier à l’acquéreur qui a le droit d’être informé des caractéristiques du bien dont il envisage l’acquisition et c’est tout la difficulté, mais aussi la richesse du métier d’agent immobilier.

THIERRY PELLETIER / Avocat : EN SAVOIR +